Initiation à la philosophie en 1ère.

Publié le 24 Août 2007

Initiation à la philosophie en 1ère.

 

 

 La philosophie est, en cette année 2005-2006, présente dans les classes de 1èreL et de 1èreES de notre établissement scolaire. Voilà une initiative qui n’est pas sans réjouir ceux qui pensent que cette discipline a bien droit de cité, en dehors du cursus de la terminale, où elle figure en bonne place dans les trois séries. Cette nouvelle expérience se déroule en effet une fois par semaine à raison d’une période de quarante-cinq minutes.

 Mais enfin, qu’y fait-on exactement ? Balayons d’emblée les inquiétudes : les élèves de première sont trop jeunes, laissons-les mûrir, ils ne disposent pas encore des connaissances de leurs aînés de terminale, l’abstraction leur fait peur et le statut des concepts est pour eux intouchable. Malgré ces réticences ou ces angoisses, la philosophie y déploie son travail d’analyse. D’abord dans une triple direction, celles de l’approche méthodologique : conceptualiser, problématiser, dialectiser.

 

I- Conceptualisation

Comment fabrique-t-on en philosophie un concept ? Celui-ci est bien une définition, mais si elle est figée dans un dictionnaire et utilisée indistinctement, voire maladroitement dans le langage usuel, le concept est une représentation abstraite, une notion idéelle, qu’il faut construire par un travail de délimitation de ses significations et de ses domaines de référence. Ainsi, avons-nous construit le concept de violence en travaillant quinze énoncés où il était présent (1). De l’attentat du 11 septembre au test de Milgram (2), en passant par le conflit de Stalingrad (3), la condamnation du serial killer Andrei Chikatilo (4) et les recherches des laboratoires américains et soviétiques sur la guerre bactériologique (5), les élèves ont dû tirer de ces exemples les caractéristiques de la violence. Ils l’ont alors définie anthropologiquement comme une expression de la pulsion de mort (6) ou comme le résultat de la volonté de causer des dommages à l’autre, c'est-à-dire de produire le mal.. Collectivement, la violence a correspondu à  l’action du pouvoir du dogmatisme politique ou religieux. Dans le domaine des sciences, elle a incarné, pour eux, l’expression de la volonté de domination, relayée par la technologie de l’armement par exemple. Le résultat a permis une vision plus ample de la violence qui articulait ses principaux composants.

Concluons donc qu’un beau concept laisse le champ libre à des usages précis, maîtrisés et lucides dans la langue et le discours des élèves.

 

II-Problématisation

Nous nous sommes ensuite attaqués à cette difficulté, qui a consisté à penser un problème, lui aussi défini un peu vite dans le dictionnaire en fonction de son étymologie, comme un obstacle dans notre réalité. Si la philosophie examine des problèmes, ceux-ci ne lui sont pas livrés de facto. Pour les identifier, faut-il encore les faire apparaître grâce à un petit exercice de questionnement du concept justement. Si la pulsion de mort dote la violence d’une origine physiologique, comme énergie du corps de l’homme qui cherche à se décharger, en néantisant son objet, et si elle dispose également d’une origine psychologique dans les représentations et discours qu’elle suscite, quel obstacle à la vie des hommes érige-t-elle ? L’exercice invite alors à poser une question qui soit à la fois universelle et nécessaire ; par conséquent, intéressante, parce qu’elle concerne la vie de chacun d’entre nous. D’un côté, nous avons l’individu dangereux par excellence, puisqu’il ne connaît pas le « stock » et la nature de son énergie pulsionnelle, et de l’autre, les exigences d’une vie sociale réglée et harmonieuse. Il faut donc s’interroger sur ce qui pourrait neutraliser la violence chez le sujet lui-même et dans la société où il vit. Peut-on empêcher la violence ? Question qui renvoie à notre insécurité avec les autres, ainsi qu’au risque potentiel que nous incarnons tous.

Après un beau concept, voilà un beau problème. Les élèves découvrent alors l’urgence d’une problématique. Or penser cette urgence, c’est attirer l’attention de ceux à qui l’on s’adresse. Découverte qui autorise la prise en compte du public ou du lecteur. Si j’ai à m’exprimer, autant que l’on m’écoute en vertu de l’importance de ce que j’ai à dire.

 

III-Détermination des hypothèses logiques de réponse.

Mais si la philosophie pose des problèmes, elle prétend aussi y répondre, ou en tout cas, proposer des hypothèses logiques de réponse. C’est la phase dialectique. Il nous faut ensemble repérer ce que logiquement un esprit rationnel pourrait soutenir. Ou il est impossible d’empêcher la violence de se déchaîner car l’essence de l’homme ne peut être changée par sa simple volonté. Dans ce cas, résignons-nous à répondre à la violence par la violence, individuellement dans le cadre de la légitime défense, ou collectivement par les moyens de coercition et de répression institutionnels. Ou bien le travail culturel de la civilisation (cf.éducation, morale, civisme) et la connaissance de son inconscient grâce au travail analytique de la psychanalyse, pourraient faire en sorte de limiter les débordements violents et de pérenniser la paix sociale.

Cette phase de la réflexion vise surtout à clarifier des positions. On observe parfois que les élèves, lorsqu’ils passent à la phase de rédaction sur la copie, du plan au brouillon, ont tendance à oublier ce qu’ils doivent établir, se perdant dans des détails ou dans des références de cours. En délimitant les options de réponse avec clarté, ce piège est évité.

 

IV-Argumentation

Mais comment détailler ces thèses, c'est-à-dire les argumenter? Les élèves, librement, ont construit progressivement ce plan ou organisation générale de la pensée.

 

A) La violence appartient à notre nature d’homme. A la différence des animaux, elle ajoute aux dommages, le mal souhaité et voulu. Cette méchanceté ne peut être extirpée du cœur de l’homme. On ne peut donc empêcher son expression violente.

 

1- La pulsion de mort définit l’homme comme un être fondamentalement dangereux.

a)Elle se dit dans toutes les formes de violence identifiées dans la phase de conceptualisation travaillées dans le I.

b) Elle désigne l’homme égoïste que nous sommes tous, qui veut satisfaire à tout prix son intérêt, et ce, même s’il s’agit de causer des dommages physiques ou psychologiques à l’autre. La pulsion, tout en se déchargeant, accroît ma puissance, le bien-être de mon moi et produit du plaisir.

 

2-La violence apparaît souvent comme réactive dans la mesure où elle est le seul moyen pour éradiquer la violence de l’autre.

a) C’est le cas de la légitime défense, ainsi que de l’attaque préventive.

b) La spiritualisation de la violence rend les discours idéologiques capables d’instrumentaliser l’agression en la motivant par la propagande.

 

B) L’on peut empêcher la violence. Les solutions existent dans le domaine politique et dans le domaine de l’herméneutique psychanalytique.

 

1- Le régime démocratique de l’Etat donne le pouvoir législatif au peuple et le responsabilise face à la loi.

a- En démocratie (gouvernement du peuple par le peuple), grâce au suffrage universel, les citoyens votent la loi. Ils sont autonomes (cf.Ils se prescrivent à eux-mêmes leur propre structure juridique).On peut donc penser qu’ils sont, à la fois, à la source du législatif et soumis à la loi. La conséquence de ce type de régime politique amène une acceptation du droit, donc limite les risques de rébellion puisque les citoyens sont membres du souverain et aussi personnes juridiques.

b- La démocratie éduque ses citoyens grâce à des institutions qui favorisent le dialogue contradictoire. S’expriment les différends dans le débat, et par conséquent, la suppression ontologique du contradicteur est a priori refusée.

 

2- La pulsion peut être détournée dans des activités de sublimation où l’on voit toute l’importance de la culture humaine au service de la civilisation.

 

V-La pratique de l’illustration

La pratique de l’illustration peut ici être d’un grand secours. Trois textes sont proposés à la sagacité des élèves. L’un développe une définition de l’homme comme profondément méchant (7), l’autre  détermine l’origine de la violence comme un conflit d’intérêt où il faut prendre les devants en agressant (8) et, le dernier, défend l’idée d’une liberté comme autonomie (9). Le premier donne à la violence un caractère inéluctable ; véritable nature de notre être, elle nous donne notre identité dangereuse. Le second décrit la violence dans une de ses dimensions temporelles, celle de l’anticipation. Le troisième suggère son possible contrôle lorsque, dans le domaine politique, les citoyens se dotent de lois qu’ils choisissent et qu’ils appliquent sur eux-mêmes.

Les élèves ont pour tâche d’identifier les principaux arguments des deux textes, pour les faire jouer dans la thèse qui leur correspond. Ils ont choisi cette partie du texte de Freud pour illustrer le petit 1) a) du A) : le prochain n’est pas seulement pour lui une aide et un objet sexuel possibles mais aussi une tentation, celle de satisfaire sur lui son agression, d’exploiter sans dédommagement sa force de travail, de l’utiliser sexuellement sans son consentement, de s’approprier ce qu’il possède, de l’humilier, de lui causer des douleurs, de le martyriser et de le tuer. Puis  cette idée de Hobbes pour le petit 2) b) du A) : Du fait de cette défiance de l’un à l’égard de l’autre, il n’existe pour nul homme aucun moyen de se garantir qui soit aussi raisonnable que le fait de prendre les devants, autrement dit, de se rendre maître, par la violence ou par la ruse, de la personne de tous les hommes pour lesquels cela est possible, jusqu’à ce qu’il n’aperçoive plus d’autre puissance assez forte pour le mettre en danger.

Pour le 1) a) du B), deux extraits de Rousseau Du Contrat social, LI, chVI, intitulé Du Pacte social: Trouver une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant. LI, ChVII, intitulé Du Souverain : L’acte d’association renferme un engagement réciproque du public avec les particuliers, et que chaque individu, contractant, pour ainsi dire, avec lui-même, se trouve engagé sous un double rapport ; à savoir, comme membre du souverain envers les particuliers, et comme membre de l’Etat envers le Souverain. Ce chemin (metodos en grec qui sera traduit par méthode) dessine, progressivement, la forme d’un discours argumenté où la position est désormais affichée et les arguments mobilisés.

 

 

VI-Phase de dialectisation

Une fois l’opposition bien établie, nous devons nous livrer à une évaluation des réponses. Quels sont les défauts et les avantages de chacune des thèses ? La première est anthropologique et de nature définitionnelle. Elle décrit les dangers que l’homme porte en lui.

Elle pointe le manque de scrupule des individus quand leur intérêt est en jeu. Apparemment, rien ne peut empêcher la violence.

Mais la critique doit faire son œuvre. D’abord, une définition de l’homme n’interdit nullement la convocation des moyens de la culture. La nature peut être transformée, modifiée par les éléments culturels.

Cette idée constitue une critique efficace de la réponse « non » à la question. La seconde thèse propose une solution politique, réduisant le sujet à la personne juridique. Mais elle paraît raisonnable dans le sens où l’univers des prohibitions légales y accroît son pouvoir. De plus, elle revendique la culture comme l’ensemble des œuvres civilisatrices de l’homme. Nous obtenons alors ce type de plan détaillé.

 

 

A) La violence appartient à notre nature d’homme. A la différence des animaux, elle ajoute aux dommages le mal souhaité et voulu. Cette méchanceté ne peut être extirpée du cœur de l’homme. On ne peut donc empêcher son expression violente.

1- La pulsion de mort définit l’homme comme un être fondamentalement dangereux.

a)Elle s’exprime dans toutes les formes de violence identifiées dans la phase de conceptualisation travaillées dans le I.

- Freud : le prochain n’est pas seulement pour lui un aide et un objet sexuel possibles mais aussi une tentation, celle de satisfaire sur lui son agression, d’exploiter sans dédommagement sa force de travail, de l’utiliser sexuellement sans son consentement, de s’approprier ce qu’il possède, de l’humilier, de lui causer des douleurs, de le martyriser et de le tuer.

- Exemple du serial killer Andrei Chikatilo

b) Elle désigne l’homme égoïste que nous sommes tous, qui veut satisfaire à tout prix son intérêt et ce, même s’il s’agit de causer des dommages physiques ou psychologiques à l’autre. La pulsion, tout en se déchargeant, accroît ma puissance, le bien-être de mon moi et produit du plaisir.

Jamais on ne fait le mal si pleinement et si gaiement que quand on le fait en toute conscience. Pascal, Pensées, XIV, 895

2-La violence apparaît souvent comme réactive dans la mesure où elle est le seul moyen pour éradiquer la violence de l’autre.

a) C’est le cas de la légitime défense ainsi que l’attaque préventive.

Hobbes :Du fait de cette défiance de l’un à l’égard de l’autre, il n’existe pour nul homme aucun moyen de se garantir qui soit aussi raisonnable que le fait de prendre les devants, autrement dit, de se rendre maître, par la violence ou par la ruse, de la personne de tous les hommes pour lesquels cela est possible, jusqu’à ce qu’il n’aperçoive plus d’autre puissance assez forte pour le mettre en danger.

 

b) La spiritualisation de la violence rend les discours idéologiques capables d’instrumentaliser l’agression en la motivant par la propagande.

(cf.Discours d’Hitler face au totalitarisme stalinien, exemple de l’attentat du 11 septembre, recherches des américains et des soviétiques dans les programmes de guerre bactériologique.).

 

Partie d’évaluation de la première thèse :

1-L’argument selon lequel la nature est incontournable et incarne une fatalité nie une réalité historique, donc culturelle. Certes, l’homme est méchant, fait preuve d’une tendance intrinsèque à la violence, cependant, la générosité, le don, la bienveillance, l’altruisme sont aussi des tendances, mais celles-ci sont bien évidemment culturelles.

2- La violence n’est jamais une solution. Au contraire, on peut penser que répondre à la violence par la violence ne fait qu’envenimer les tensions. Avec les grands pacifistes (cf.Luther King, Gandhi), le refus de la violence révèle un modèle, de plus efficace, pour régler les tensions.

3- Faisons la différence entre les violences dues à la terreur, aux totalitarismes ou diverses fanatismes, et les actes de résistance aux injustices et à l’arbitraire. Il s’agit alors d’une défense qui vise à supprimer l’injustice, donc la source de la violence.

Exemple : La résistance française a fait dérailler des trains et a éliminé physiquement des soldats allemands afin de libérer la France du joug nazi.

 

B) L’on peut empêcher la violence. Les solutions existent dans le domaine politique et dans le domaine de l’herméneutique psychanalytique.

1- Le régime démocratique de l’Etat donne le pouvoir législatif au peuple et le responsabilise face à la loi.

a- En démocratie (gouvernement du peuple par le peuple), grâce au suffrage universel, les citoyens votent la loi. Ils sont autonomes (cf.Ils se prescrivent à eux-mêmes leur propre structure juridique).On peut donc penser qu’ils sont, à la fois, à la source du législatif et soumis à la loi. La conséquence de ce type de régime politique amène une acceptation du droit, donc limite les risques de rébellions puisque les citoyens sont membres du souverain et aussi  personnes juridiques.

Rousseau : Trouver une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant.

 L’acte d’association renferme un engagement réciproque du public avec les particuliers, et que chaque individu, contractant, pour ainsi dire, avec lui-même, se trouve engagé sous un double rapport ; à savoir, comme membre du souverain envers les particuliers, et comme membre de l’Etat envers le Souverain.

b- La démocratie éduque ses citoyens grâce à des institutions qui favorisent le dialogue contradictoire. S’expriment les différends dans le débat, et par conséquent, la suppression ontologique du contradicteur est a priori refusée.

Référence à l’adage : Il vaut mieux parler que de se battre.

2- La pulsion peut être détournée dans des activités de sublimation où l’on voit toute l’importance de la culture humaine au service de la civilisation.

C’est selon la psychanalyse la capacité d’échanger le but qui est à l’origine sexuel contre un autre qui n’est plus sexuel mais qui est psychiquement parent avec le premier.Un tel processus rend compte d’activités correspondant à des buts socialement valorisés (création artistique, activités intellectuelles) apparemment sans rapport avec la sexualité, mais qui trouvent cependant leur source dans la pulsion sexuelle.

G.Durozoi, Dictionnaire de philosophie, P369, Editions Nathan.

 

Face au problème, il apparaît désormais que le choix le plus adéquat réside dans la seconde proposition de réponse.

Notre dernier exercice va consister à demander aux élèves de venir au tableau et de présenter oralement cette analyse que nous avons réalisée conjointement. L’on travaille alors la clarté d’un exposé et les petits « trucs » de la communication qui viennent rendre l’échange fluide entre l’orateur et les spectateurs.

 

VII-Conclusion

On le voit, une initiation à la philosophie se propose, avant tout, de donner le goût de l’analyse philosophique, en construisant un dialogue avec les élèves, et non un débat à bâtons rompus d’où les exigences seraient absentes. Ainsi, l’on aborde les nécessités logiques de la réflexion, conditions d’un discours à visée démonstrative, dont le but est de faire prendre conscience de l’autonomie d’une pensée produite par l’élève lui-même.

A la suite de ces exercices, les élèves expérimentent la compréhension, l’extension et la précision d’un concept, les obstacles qu’il dresse sur la route de notre existence sous la forme problématique, mais aussi ce que la puissance dialectique de la philosophie peut mobiliser pour lui fournir de possibles solutions.

Mais il existe également une autre vertu de cette expérience, précisément dans les classes de première. Les élèves préparent l’examen des T.P.E (Travaux Personnels Encadrés) qui correspondent à une initiation à la recherche, aboutissant à une production défendue devant un jury. Dans la pratique de philosophie, nous avons souvent mis l’accent sur la réutilisation des différents aspects de la méthodologie (cf. Conceptualisation, problématisation, élaboration d’un plan détaillé, compétence de l’illustration avec sélection des textes) pour construire, et réaliser, cette production finale des T.P.E. En effet, pour choisir un thème de T.P.E, il faut  d’abord le définir en fonction de ses domaines de référence et d’application. Construire une problématique suppose un travail d’identification des contradictions internes à une notion ou à un groupe de notions. A partir de cette recherche, dégager les hypothèses de traitement de la question posée se réalise dans une organisation précise, qui doit être légitime. Détailler ce plan revient à travailler dans les documents, ceux qui sont pertinents, afin d’illustrer le propos. On le voit, une méthodologie philosophique est ici bien utile.

Bref, ne gâchons pas notre plaisir ! Une fois par semaine, pendant quarante-cinq minutes, la philosophie rappelle au professeur de philosophie qu’il a bien de la chance : celle de faire de la philosophie et…de la faire avec les élèves de 1èreL et de 1ère ES.

 

BRUNO GUITTON

Professeur de Philosophie

 

 

NOTES

1-a)Ben Laden est l’auteur des attentats du 11 septembre où des tours ont été détruites. Il s’agit d’un acte terroriste qui vise les Etats-Unis. Des milliers de personnes y ont trouvé la mort sans être mêlées de près à la politique de l’état américain. b)Le viol est un acte sexuel forcé qui vise à satisfaire, de la part du violeur, un désir sexuel. c)- La résistance française a fait dérailler des trains et a éliminé physiquement des soldats allemands. d)- La violence de Dieu dans la Genèse (6,8) : Et Yahvé dit : Je vais effacer de la surface de la terre les hommes que j’ai créés- et avec les hommes, les bestiaux, les bestioles et les oiseaux du ciel- car je me repends de les avoir fait. Pourquoi ? Parce que la terre était remplie de violence à cause des hommes. e)-On a observé ces dernières années des meurtres perpétrés dans les écoles américaines ; meurtre commis par des adultes et aussi des enfants. f)- Les soldats soviétiques et allemands s’entretuent à Stalingrad. g)- Dans son procès, le commandant du camp d’Auschwitz affirme n’avoir obéi qu’aux ordres. h)- Il voulait me tuer ; je me suis défendu. Je l’ai abattu. i)- J’adore jouer à ce jeu informatique, où je suis aux commandes d’un chasseur bombardier, et je détruis sur mon écran des villes entières. j)- Jamais on ne fait le mal si pleinement et si gaiement que quand on le fait en toute conscience. Pascal, Pensées, XIV, 895. k)- Le test de Milgram. l)- Il vaut mieux parler que de se battre. m)- Le serial killer Andrei Chikatilo a tué plus de 50 personnes. n)- L’animal n’est pas sadique. o)- Les laboratoires d’études scientifiques ont aux Etats-Unis et en Union Soviétique produit des armes bactériologiques.

 

2-Le directeur de l’expérience commence par payer aux participants une indemnité minime pour les dédommager de la perte de temps. Puis il leur déclare qu’il organise une enquête importante sur l’efficacité du châtiment en matière de mémoration. On va constituer des groupes de deux hommes : l’un sera le  « professeur », l’autre « l’élève ». L’expérimentateur s’arrange pour que le sujet non initié soit chaque fois choisi comme « professeur », le complice de l’expérimentateur est « élève » : il prend place sur une sorte de chaise électrique et répond à une série de questions préparées qui constituent des tests de mémoire. Le professeur a mission de punir toute réponse fausse d’un choc électrique d’intensité croissante. L’appareil électrique qui déclenche les décharges porte 30 chiffres de voltage allant de 15 à 450 volts, assortis au début de la mention : décharge légère, et à la fin, de l’avertissement : danger, forte décharge. Le professeur reçoit lui-même avant le début de la série d’expériences une décharge de 45 volts à titre d’information, qui le convainc de l’efficacité des mécanismes dont il dispose.

L’élève multiplie les réponses fausses. Le professeur obéit à l’ordre reçu, il augmente la force de la décharge. A partir de 75 volts, l’élève se met à gémir et à se lamenter ; à 180 volts, il demande grâce, à 300 volts ses cris se taisent. Le directeur des expériences ordonne de continuer : « Il faut poursuivre, pas d’autre possibilité. »…

Or, les séries d’expérience qui furent réalisées sur le modèle de Milgram grâce à la collaboration de la télévision bavaroise et de l’Institut Max Planck, démontrèrent que 85% des personnes testées demeuraient les sujets dociles de l’expérimentateur scientifique et persistaient jusqu’au bout.

Friedrich Hacker, Agression, violence dans le monde moderne, Calmann-Lévy, 1971, p209-213

 

3-La bataille de Stalingrad se déroula de septembre 1942 à février 1943 et opposa les armées allemande, italienne, roumaine, à l’armée soviétique.

 

4-Surnommé "Le monstre de Rostov", Andrei Chikatilo est un tueur en série ukrainien qui a fait une cinquantaine de victimes.

 

5-La peur du recours aux armes biologiques - le « nucléaire du pauvre » - par des pays non occidentaux hostiles ou « irresponsables » a été régulièrement agitée par l’Occident. Pourtant, ces armes de destruction massive ont été d’abord développées par les pays industrialisés, notamment les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l’ex-URSS, l’Allemagne, le Japon et le Canada.

Le monde diplomatique, article de Susan Wright, Double langage et guerre bactériologique. Novembre 2001.

 

6-Après de longues hésitations, de longues tergiversations, nous avons résolu de n’admettre l’existence que de deux pulsions fondamentales : l’Eros et la pulsion de destruction…Le but de l’Eros est d’établir de toujours plus grandes unités, donc de conserver : c’est la liaison. Le but de l’autre pulsion, au contraire, est de briser les rapports, donc de détruire les choses. Il nous est permis de penser de la pulsion de destruction que son but final est de ramener ce qui vit à l’état inorganique et c’est pourquoi nous l’appelons aussi pulsion de mort.

Freud, Abrégé de psychanalyse, Puf, pp8-9, (1938).

 

7- L’homme n’est pas un être doux, en besoin d’amour, qui serait tout au plus en mesure de se défendre quand il est attaqué, mais qu’au contraire il compte aussi à juste titre parmi ses aptitudes pulsionnelles une très forte part de penchant à l’agression. En conséquence de quoi, le prochain n’est pas seulement pour lui une aide et un objet sexuel possibles mais aussi une tentation, celle de satisfaire sur lui son agression, d’exploiter sans dédommagement sa force de travail, de l’utiliser sexuellement sans son consentement, de s’approprier ce qu’il possède, de l’humilier, de lui causer des douleurs, de le martyriser et de le tuer. Homo homini lupus ; qui donc, d’après toutes les expériences de la vie et de l’histoire, a le courage de contester cette maxime.

Sigmund Freud, Le Malaise dans la culture, pp53-54, Ed PUF, (1930)

 

 8-Si deux hommes désirent la même chose alors qu’il n’est pas possible qu’ils en jouissent tous les deux, ils deviennent ennemis : et dans leur poursuite de cette fin (qui est, principalement, leur propre conservation, mais parfois seulement leur agrément), chacun s’efforce de détruire ou de dominer l’autre. Et de là vient que, là où l’agresseur n’a rien de plus à craindre que la puissance individuelle d’un autre homme, on peut s’attendre avec vraisemblance, si quelqu’un plante, sème, bâtit, ou occupe un emplacement commode, à ce que d’autres arrivent tout équipés, ayant uni leurs forces, pour le déposséder et lui enlever non seulement le fruit de son travail, mais aussi la vie ou la liberté. Et l’agresseur à son tour court le même risque à l’égard d’un nouvel agresseur.

Du fait de cette défiance de l’un à l’égard de l’autre, il n’existe pour nul homme aucun moyen de se garantir qui soit aussi raisonnable que le fait de prendre les devants, autrement dit, de se rendre maître, par la violence ou par la ruse, de la personne de tous les hommes pour lesquels cela est possible, jusqu’à ce qu’il n’aperçoive plus d’autre puissance assez forte pour le mettre en danger. Il n’y a rien là de plus que n’en exige la conservation de soi-même, et en général on estime cela permis.

Il apparaît clairement par là qu’aussi longtemps que les hommes vivent sans un pouvoir commun qui les tienne tous en respect, ils sont dans cette condition qui se nomme guerre, et cette guerre est guerre de chacun contre chacun.

Thomas Hobbes, Leviathan, pp122-124, Ed Sirey, (1651).

 

9- Rousseau, Du Contrat Social, LI, CH VI intitulé Du pacte social, (1762):

Or comme les hommes ne peuvent engendrer de nouvelles forces, mais seulement unir et diriger celles qui existent, ils n’ont plus d’autre moyen pour se conserver que de former par agrégation une somme de forces qui puisse l’emporter sur la résistance, de les mettre en jeu par un seul mobile et de les faire agir de concert.

Cette somme de forces ne peut naître que du concours de plusieurs : mais la force et la liberté de chaque homme étant les premiers instruments de sa conservation, comment les engagera-t-il  sans se nuire, et sans négliger les soins qu’il se doit ? Cette difficulté ramenée à mon sujet peut s’énoncer en ces termes : Trouver une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant

 

Rousseau, Du Contrat Social, LI, ChVII, intitulé Du Souverain :

L’acte d’association renferme un engagement réciproque du public avec les particuliers, et que chaque individu, contractant, pour ainsi dire, avec lui-même, se trouve engagé sous un double rapport ; à savoir, comme membre du souverain envers les particuliers, et comme membre de l’Etat envers le Souverain. Mais on ne peut appliquer ici la maxime du droit civil que nul n’est tenu aux engagements pris avec lui-même ; car il y a bien de la différence entre s’obliger envers soi ou envers un tout dont on fait partie.

 

 

   

ANNEXE

 

Document présenté aux parents d’élèves en début d’année qui décrit notre projet d’expérience de la classe de première.

 

 

Initiation à la philosophie en première. (2005-2006).

I- Pourquoi ?

- Parce que nous vivons des époques de grands changements, voire de mutations ; situation qui convoque  l’analyse philosophique.

- Parce que face à la complexité du monde, les outils de la réflexion philosophique sont d’une grande utilité.

- Parce que la philosophie comme discours rationnel organisé et précis permet une grande efficacité dans la communication définie comme échange d’arguments.

- Pour associer l’élaboration de sa pensée et la notion de plaisir.

- Pour comprendre le réel et se doter des moyens pour s’y positionner.

- Pour commencer à appréhender la notion de responsabilité intellectuelle.

- Parce qu’il y a une exigence renouvelée de sens dans un environnement difficile et exigeant.

- Parce que certains élèves de terminale de l’an passé, dans un questionnaire sur notre institution d’enseignement, ont exprimé le souhait de voir la philosophie en 1ere comme une auxiliaire précieuse pour leur réflexion.

 

II- Comment ?

-   Exercice de problématisation ou de construction de contradictions.

-   Exercice de conceptualisation : comment forger la définition d’un concept.

-   Exercice d’argumentation d’une idée ou d’une thèse.

-   Exercice des dilemmes moraux.

-   Exercice de dialectique, c'est-à-dire d’usage de son pouvoir critique.

-   Exercice d’illustration d’une idée ou d’une prise de position théorique par des exemples, le choix de textes ou des références doctrinales.

-   Exercice linéaire d’explication de quelques phrases d’un texte philosophique.

-  Pratique du dialogue philosophique à partir de l’analyse définitionnelle d’un énoncé sous forme de question.

-   Pratique de l’exposé oral et des techniques de présentation.

 

III- Limites

-    Ne seront pas traitées les notions du programme de terminale pour garantir une égalité stricte à l’examen, mais il est inévitable de croiser sur sa route les champs problématiques qui sont ceux de terminale puisqu’ils résument les grands axes de la recherche philosophique.

-  Aucune méthodologie globale sur les exercices du bac, c'est-à-dire dissertation et explication de texte, ne sera fournie.

-      Il n’y aura pas de travail à faire à la maison, ni de note attribuée.

-    L’initiation sera pratiquée avec le même sérieux qu’en classe de terminale et engage la présence obligatoire ainsi que la concentration.

 

IV- Thèmes choisis

-   L’AMITIÉ.

-   LA VIOLENCE

 

BRUNO GUITTON

Professeur de Philosophie

Rédigé par Bruno Guitton

Publié dans #Expériences pédagogiques

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