Les deux conceptions du temps à prendre en compte dans le changement ou comment Bergson nous vient en aide.

Publié le 20 Août 2018

 

Personne ne nie aujourd’hui la réalité des changements au cœur de l’entreprise. Mais ils ne peuvent être effectués qu’avec l’adhésion de ceux qui officiellement doivent y être engagés. Cette adhésion est l’expression d’une volonté qui décide après l’usage de la pensée logique (les philosophes diraient de l’entendement ou de la raison) dont la finalité est la compréhension du « pour quoi » et du « comment » des changements. Dans notre travail chez Philo Conseil, il nous est apparu que la problématique de la réussite de ces transformations ne convoquait la pensée du temps que fort incomplètement.

Nécessaire du point de vue pratique et fondamentalement utile, le temps des changements doit être d’abord conçu comme « temps emploi du temps ». Il s’agit en effet du temps découpé par l’intelligence humaine, pratique, objectif, mesurable, exprimé en langage mathématique, extérieur à l’être car les instants ne s’y distinguent que par les actions qu’on y réalise. Ainsi, il autorise le reporting, les graphiques et statistiques.

Mais ce temps dont le philosophe Bergson  considérait qu’il n’exprimait que les calculs de notre intelligence n’est pas essentiellement celui de notre identité. Ce qu’il appelle la durée est temps de la conscience, du vécu de l’individu, de son moi profond. C’est un temps gros du passé et déjà riche de l’avenir qui se distingue du « temps emploi du temps » par sa qualité. Par conséquent, il est surtout vécu du changement.  Ainsi avons-nous déjà eu l’occasion dans une intervention de Philo Conseil de constater les difficultés d’une stratégie managériale de changement sans prise en compte de cette durée subjective.

Une employée, hôtesse d’accueil, se plaignait à nous des nouvelles contraintes de la relation client : pas plus de trois minutes par conversation ! Elle s’attristait de ce changement : « Comment vais-je encore pouvoir parler aux gens vraiment dans ce laps de temps si court ? » Pour elle, conflit il y avait entre le « temps emploi du temps » et la durée identifiée dans son expérience au temps de la parole échangée. Nous l’avons donc fait travailler sur l’usage du langage en temps limité : peut-on y exister avec qualité dans une impression de durée qui fait oublier les mathématiques des trois minutes ? Peut-on se satisfaire de cette courte période si l’on dit ce que l’on a à dire avec sa propre identité, son expérience passée et sa maîtrise du futur immédiat ? On peut parler une heure pour ne rien dire ou parler trois minutes et vivre le temps plein de la durée. Quiconque a eu un interlocuteur conscient de ce challenge dans une relation professionnelle sait qu’on passe un moment marqué par efficacité et humanité donc…efficacité.

Conseillons alors à toute politique de changement d’articuler savamment ces deux conceptions du temps si l’objectif est bien que tout le monde y trouve son compte.

BG

 

Rédigé par Bruno Guitton

Publié dans #Entreprise

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